- Mohammed Bakrim//
La température baisse à Marrakech, espérons que cela annonce des pluies pour bientôt. Celle de la compétition officielle augmente avec des films venus d’horizons divers mais portés par la même appartenance au continent cinéma. Des premiers films de jeunes cinéastes mais avec des sujets inscrits dans des interrogations aussi vieilles que le monde, la quête identitaire, la violence des rapports sociaux. Confirmant ainsi que le cinéma est le meilleur catalyseur de notre imaginaire contemporain.
Autobiography de Makbul Moubarak, un critique qui a changé de camp en choisissant de devenir cinéaste, construit un récit sombre et énigmatique. Il nous transpose dans un pays qui peine sous une double oppression, militaire et sociale. Les élections qui se préparent ne sont qu’un leurre.
Rakib, jeune en phase d’évolution et de mutation intellectuelle et sociale se trouve employé chez un général à la retraite alors qu’il rêvait en fait de joindre un trafic de migration vers Singapour. Son père est en prison. Le général se trouve dans une symbolique de substitution. Un mentor.
Rakib semble s’y plaire notamment quand il endosse l’uniforme de militaire. Un plan très bref capte des yeux qui brillent de bonheur. Un accès à une forme de pouvoir qui ne déplairait pas à son père. Mais en fait c’est un engrenage qui va le mettre à rude épreuve.
Le film qui évolue délibérément dans une atmosphère d’enfermement, nocturne et sombre vire au thriller politique avec un général qui n’accepte pas de voir sa campagne perturbée.
Rakib est acculé à agir. La jeunesse passe aux armes Son action l’amène cependant à prendre conscience de la complexité des rapports sociaux ; confirmant la théorie pessimiste que c’est toujours le système qui l’emporte.
Une autre variante du système, une autre illustration de la complexité des rapports sociaux avec Riceboy sleeps d’Anthony Shim (2022). Une illustration également de la diversité des modes de production du cinéma.
Mon voisin me dit : ce n’est pas un film coréen ? Le cinéaste en effet est d’origine coréenne, et le récit se déroule en partie en Corée du sud. Néanmoins, il est inscrit en compétition comme un film canadien. L’une des interrogations inutiles à ne pas poser désormais pour un film, est sa nationalité. Les formes de productions impliquent des guichets qui émanent de plusieurs pays.
Cela n’est pas sans avoir des conséquences sur l’écriture et l’esthétique d’un film. Dans ce contexte de mondialisation, Anthony Shim réussit la prouesse de nous fournir justement avec Riceboy sleeps, à un niveau intime et familial, une œuvre accomplie, profonde, humaine et poétique.
S’inspirant en partie de sa propre biographie, il suit le parcours dramatique d’une mère célibataire coréenne immigrée au Canada.
Comment élever un enfant dans un contexte hostile ; comment affronter une maladie incurable, comment gérer une vie sentimentale sans briser des liens et des espoirs fragiles.
Le film aborde aussi à sa manière la question récurrente dans beaucoup de films de cette édition, la question du père. Le schéma paraît scolaire puisque c’est le professeur qui invite ses élèves à tracer l’arbre généalogique de leurs familles.
Pour le jeune adolescent coréen, c’est la voie à d’immenses interrogations auxquelles la mère hésite à répondre.
Dans un joli clin d’œil au récit immortalisé par le film La ballade de Narayama de Shohei Imamura, la mère prend la décision d’un retour aux sources.
Avec un double effet : se réconcilier avec sa propre famille ; renforcer les liens avec son fils qui peut partir désormais de bon pays car sachant désormais d’où il vient.
La symbolique de la veste militaire héritée de son père renvoie à ses nouvelles dispositions à être lui-même et non plus Michael Jordan, son rêve au moment de son arrivée au Canada.
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