Mohammed Bakrim//
J’ai appris ce week-end avec beaucoup de tristesse et d’affliction la disparition du regretté camarade et ami Mae Elainaine Mrabih Rabbou. Cadre supérieur au ministère de la communication, militant du PPS, président de la fondation Mae Elainaine pour le patrimoine et l’échange culturel…, il était surtout pour nous qui l’avions côtoyé pendant deux années au sein de la commission d’aide à la production cinématographique nationale, la figure idéale de l’intellectuel intègre et engagé.
Un profil humain et intellectuel exceptionnel forgé par l’histoire, celle de sa famille, de son parcours personnel et de son pays. Il était dans l’esprit du temps au sens fort de l’appartenance à une culture enracinée dans un riche patrimoine et ouverte sur les temps modernes avec leurs espoirs et leurs désenchantements.
Issu d’une grande famille qui a marqué l’histoire contemporaine du Maroc par son apport multiple ce qui l’a dotée d’une forte assise spirituelle et d’une grande capacité de discernement. Un bagage qui a fait de lui un cadre politique de grande valeur au sein de la jeunesse sahraoui éprise de valeurs de libération et de justice sociale mais qui a su très tôt éviter les mirages entretenues par le courant séparatiste devenu un instrument à la solde des ennemis de l’unité territoriale du pays.
Pendant nos retrouvailles à Rabat, je profitais de chaque pause, de chaque moment de répit au cours des travaux de la commission d’aide pour discuter et échanger avec lui. Il aimait m’interroger, preuve de sa grande érudition, sur les connexions entre l’amazigh de Souss et le hassani. Moi par contre j’en profitais beaucoup pour l’interroger sur son expérience politique, sur les paysages sahariens que j’aime beaucoup. Suite à un souhait que j’avais formulé, nous avions convenu ensemble d’un long voyage vers Aousserd au cœur de la région de Oued Eddab ; généreux, il m’avait promis de s’en occuper…Dieu en décidé autrement.
Au sein de la commission, il jouissait d’un immense prestige ayant séduit tout le monde par ses qualités humaines et surtout par son grand savoir encyclopédique. Il était discret, humble d’une grande humilité, n’ayant aucune prétention à intervenir sur des sujets techniques du cinéma mais quand il intervenait dans les débats de fond sur notamment les scripts concernant la culture hassanie, les autres membres étaient d’une grande écoute et n’hésitaient pas souvent à accueillir ses interventions par des salves d’applaudissements.
Il n’hésitait pas à défendre ses idées et à dire le fond de sa pensée avec clarté et avec respect pour le point de vue des autres. J’ai eu une fois avec lui un vif échange à propos d’un scénario présenté par un jeune cinéaste marocain sur le leader burkinabé, Thomas Sankara. J’avais défendu le projet d’abord pour ses qualités d’écriture mais aussi pour sa portée symbolique, Sankara étant une icône de notre continent qui en manque tant et une idole chargée de valeurs positives pour la jeunesse africaine. Mae El Ainaine me ramena à la dure réalité des contingences politiques et dressa un tableau plus terre à terre du personnage, politicien qui avait cédé hélas aux sirènes des pétro-dollars libyens et algériens. Mais c’était passionnant de débattre avec lui.
Il enrichissait toujours ses propos par des citations de poèmes issus de la grande littérature arabe et ponctuait ses discours par la fameuse locution de l’imam de la prière du vendredi lors de l’intermède « je prononce ces propos en implorant la clémence de Dieu pour moi et pour vous».
Repose en paix cher ami et camarade et que Dieu t’accepte dans sa miséricorde.
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