Moha Mallal chante en amazighe libyen

Par Baha Mansoub//

Moha Mallal n’est pas uniquement le précurseur de la chanson engagée au sud-est marocain, mais également un continuateur infatigable de ladite chanson dans toute l’Afrique du nord. Disposant d’un répértoire musical riche de plusieurs albums: Asif n Dades, Timlellay, Azmul, Angi, Azwu, Amersal et Tafsut, tous écrits chantés par le chanteur-compositeur lui-même, il n’hésite pas à chanter les textes écrits par d’autres auteurs. C’est le cas, à titre d’exemple, de la chanson “Amezruy nneɣ”, écrite par le militant libyen Madɣis Umadi. Une chanson qui rend hommage aux personnalités historiques amazighes. Une belle réussite que tout amoureux de la beauté écoutera en boucle.
Écrit dans une variante de l’amazighe libyen, le texte est beaucoup plus proche d’un amazighe standard que d’une variante régionale. Une preuve que la langue première nord-africaine est bel et bien vivante, continue à véhiculer les valeurs humaines et peut s’adresser aux génération futurs en s’inspirant d’un passé glorieux occulté et relégué aux oubliette. “Amezruy nneɣ” ou notre histoire est un cri contre l’oubli, l’amnésie et l’Alzheimer identitaire, une maladie volontaire qui frappe uniquement en Afrique du nord, à tel point que le maghrebin nie ses racines et se donne une identité autre que la sienne.
De fameux Chichung en Egypte antique, à la grande Fadma n Sumer symbole de résistance à la colonisation française en Kabylie, “Amezruy nneɣ” est un vrai aperçu sur une longue histoire qui se cherche toujours une place au sein de l’école publique. Cette dernière est malheureusement envahi par de minimes créatures étrangère à notre pays. Leurs noms sont glorifiés dans les manuels scolaires et donnés à toutes sortes d’institutions publiques ou privée. Alors que les vrais héros et héroïnes, ceux et celles qui méritent de ne pas être oublié-e-s ne sont évoqués que rarement.
Heureusement qu’il y a encore des artistes à l’instar de Moha Mallal capables de chanter avec fierté et professionnalisme dans une langue minorisée, sur un peuple diabolisé, tout simplement parce qu’il dispose d’une culture véhiculant les valeurs de la résistance.
C’est d’ailleurs cette même résistance qu’inspire la chanson de Moha, avec ses mélodies, ses coups de guitare, sans oublier la belle et douce voix féminine de Toudert Bourek. Un choix intelligent de la part l’artiste Moha, puisque le texte n’oublie pas la femme, comme le font les cultures arrivées en Afrique du nord. En effet la manière dont est chanté le couplet contenant Tinhinan est tout différent des autres, comme si l’artiste veut nous dire différemment la place réservée à la femme dans la culture touarègue. Tinhinan est en fait l’ancêtre dont se réclame les amazighes de Ténéré. Même de nos jours, le système matriarcal est en vigueur chez eux. Comment se fait-il qu’on a accepté à présent une culture qui méprise aussi bien la femme que l’homme ?
La chanson, malgré sa brièveté, nous apprends sur notre histoire. Aussi nous pousse à poser plusieurs questions. Yuba était un roi savant qui a écrit dans plusieurs domaines : le théâtre, l’astronomie, le médecine … Comment a-t-on accepté d’être gouverné de nos jours par des idiots qui sont prêts à tout faire pour rien n’avance ? De Masinissa à Abdelkarim, la résistance n’a jamais cessé. Yougerten a péri dans les prisons de Rome pour que dignité soit. On a expulsé tous les colons militaires. Comment est-ce possible qu’on accepte actuellement d’être colonisé culturellement ? Est-ce normal qui l’en soit ainsi ? Nous, qui vivons sur cette qui a vu naitre Averroès, ce philosophe et grand penseur de tous les temps ? Ou encore Uxeldun, précurseur de la sociologie ? Où est le problème de nos jours ?
C’est peut-être ce que veut dire la chanson objet de ce texte. C’est d’au moins les questions qu’elle a fait naitre en moi. Notre histoire est écrite, vous n’avez qu’à la lire et relire et l’interpréter selon vos besoin. Qui ne connait pas son passé est condamné à le revivre, dit-on !
Si vous ne me croyez pas, je vous propose les paroles en amazighe libyen. Lisez-les en écoutant la belle musique de Mallal. Une belle chanson à écouter en ce début de printemps historique.
Par Baha Mansoub(Fan de Mallal)
Amezruy-nneɣ
Amezruy-nney yemmiri
G Uftas Adrar d Tniri
Yudel Cicanq alibiy
S useggwas-nnes nettari
S wass semmus mraw ari
D tẓa tmiḍiwin fellas nerni
Masinissa d agellid yezzi
I Numidya ixwa tilelli
Yugerten acenyal issali
G umaḍal amm netta wel yelli
Amnay g umezruy yuli
Kabawen illa dad yili
Amezruy nneɣ yemmiri
G uftas, Adrar d Tniri.
Yuba d amusnaw nesli
Takfarinas af Libya yezri
Tiheyya d Aksil g Tabuda yerni
Memmis n Tumert Tamazɣa yerri
Xeldun amɣar izewlen s amsali
D tarwa n Ruced deg ujenna ad nali
Tinhinan, Tinhinan, Tinhinan
Tinhina teffeɣ s Tiniri
Teḍfer tt nanna Marna mm tiziri
Abaṛṛu n Kawsen d Axeṭṭab alelli
D Faḍma n Sumer yellis n ugrawli.
Amezruy-nneɣ yemmiri,
G uftas, adrar d Tniri. ( texte de Madɣis Umadi).

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